Qu’est-ce qu’un projet entrepreneurial viable?
Par Philippes ilberzahn,
La question que se pose tout entrepreneur en herbe est celle de la bonne idée. C’est bien connu, il faut une bonne idée pour entreprendre. Une bonne idée, c’est celle qui correspond à une opportunité, c’est à dire à une demande insatisfaite du marché. Une fois qu’on a une bonne idée, il faut bâtir le projet autour de cette bonne idée, trouver les ressources nécessaires et se lancer. Un projet viable, c’est donc une bonne idée, validée si possible par une étude de marché, et un plan solide pour la mettre en oeuvre. Du moins c’est ce qu’on essaie de nous faire croire.
La réalité, en fait, est tout autre. C’est ce que suggère
l’effectuation, une théorie qui s’intéresse à ce que les entrepreneurs font vraiment
Un projet ne démarre en général pas par une grande idée. Il démarre par un individu. Vous. Même si vous n’êtes pas riche, vous disposez de ressources: votre personnalité, votre connaissance, et vos contacts personnels. Votre personnalité vous rendra sensible à tel ou tel problème, que d’autres ignoreront. Elle vous fera imaginer telle ou telle solution, à laquelle d’autres ne penseront pas ou qu’ils trouveront impossible. Elle donnera corps à une idée et la fera évoluer de manière spécifique. Donnez une idée à trois personnes, revenez dans un mois, et vous avez trois projets radicalement différents. L’expérience a été confirmé de nombreuses fois. Qui il est, ce qu’il connaît et qui il connaît, voilà trois ressources considérables qui forment le point de départ du projet entrepreneurial. A l’idée initiale, qui peut n’être qu’une intuition, une interrogation ou un problème à résoudre, il faut un déclencheur: des circonstances, une rencontre, qui font qu’on commence à s’y intéresser. Ainsi donc:
En conclusion, un projet entrepreneurial est avant tout un processus social. Il ne s’agit pas d’avoir une grande idée pour chercher ensuite à la mettre en oeuvre, mais d’organiser un processus qui fera émerger non seulement une grande idée, mais inscrira celle-ci dans la réalité. La réflexion, l’action et la recherche de parties prenantes qui s’engagent sont donc les trois axes que les entrepreneurs développent simultanément. L’un ne peut aller sans l’autre. Analysez moins, agissez plus!
Philippes ilberzahn est professeur d’entrepreneuriat, stratégie et innovation à EMLYON Business School et chercheur associé à l’École Polytechnique (CRG), où il a reçu son doctorat. Il intervient également à HEC Paris et au CEDEP (Fontainebleau).
La question que se pose tout entrepreneur en herbe est celle de la bonne idée. C’est bien connu, il faut une bonne idée pour entreprendre. Une bonne idée, c’est celle qui correspond à une opportunité, c’est à dire à une demande insatisfaite du marché. Une fois qu’on a une bonne idée, il faut bâtir le projet autour de cette bonne idée, trouver les ressources nécessaires et se lancer. Un projet viable, c’est donc une bonne idée, validée si possible par une étude de marché, et un plan solide pour la mettre en oeuvre. Du moins c’est ce qu’on essaie de nous faire croire.
La réalité, en fait, est tout autre. C’est ce que suggère
l’effectuation, une théorie qui s’intéresse à ce que les entrepreneurs font vraiment
Un projet ne démarre en général pas par une grande idée. Il démarre par un individu. Vous. Même si vous n’êtes pas riche, vous disposez de ressources: votre personnalité, votre connaissance, et vos contacts personnels. Votre personnalité vous rendra sensible à tel ou tel problème, que d’autres ignoreront. Elle vous fera imaginer telle ou telle solution, à laquelle d’autres ne penseront pas ou qu’ils trouveront impossible. Elle donnera corps à une idée et la fera évoluer de manière spécifique. Donnez une idée à trois personnes, revenez dans un mois, et vous avez trois projets radicalement différents. L’expérience a été confirmé de nombreuses fois. Qui il est, ce qu’il connaît et qui il connaît, voilà trois ressources considérables qui forment le point de départ du projet entrepreneurial. A l’idée initiale, qui peut n’être qu’une intuition, une interrogation ou un problème à résoudre, il faut un déclencheur: des circonstances, une rencontre, qui font qu’on commence à s’y intéresser. Ainsi donc:
Idée = N’importe quoi + Vous
Encore une fois, il faut insister que par idée, on n’a souvent guère
plus qu’une intuition ou une interrogation, pas un éclair de génie,
parfois même rien: les fondateurs de HP et de Sony ont trouvé leur idée 5 ans après
la création de leur société. Au début, la seule « idée » de Hewlett et
de Packard, c’était de travailler ensemble pour créer des produits
électroniques. Ce qui compte, dès lors qu’on a un « n’importe quoi » qui
nous fait tourner autour d’une idée, c’est d’agir. Plus que l’idée,
c’est l’action autour d’une idée qui compte. On a tendance à concevoir
l’action comme simple mise en oeuvre d’une idée, séparant bien l’une de
l’autre dans la grande tradition cartésienne. Mais c’est une erreur. L’action est la vraie source de nouveauté dans le monde.
Inutile de passer des heures à réfléchir dans votre chambre. Oubliez
les séances de brainstorming et de créativité. Agissez pour donner corps
à votre idée et la transformer par l’action en opportunité.
Opportunité = Idée + Action
A ce stade, vous n’avez encore qu’une opportunité, c’est à dire un ensemble d’idées, de croyances et d’actions qui visent à créer de futurs produits ou services.
C’est bien, mais c’est peu. Vous n’avez aucune indication de la
viabilité du projet, ni de véritable dynamique de celui-ci. Faire un
business plan? A ce stade, il ne sera qu’un tas de papier basé sur des
hypothèses au mieux fantaisistes. Réfléchir encore? Inutile, vous
fonctionnerez en circuit fermé. La solution? Parlez autour de vous et
suscitez l’engagement d’autres gens à votre projet. Les ressources dont
vous disposez – rappelez-vous: votre personnalité, votre connaissance,
et vos relations – vous permettent d’imaginer des objectifs possibles.
Ces objectifs vous permettent de convaincre d’autres personnes de vous
soutenir. Ce faisant, elles vous apportent de nouvelles ressources. Un
bureau mis à disposition, une aide ponctuelle, un engagement d’achat, de
la crédibilité, de l’information, etc. Leur engagement fait qu’elles
deviennent parties prenantes à votre projet. Dès lors, celui-ci commence
à réellement exister hors de votre tête.
Projet viable = Opportunité + Engagement de parties prenantes
Pour qu’un projet soit viable, il faut donc qu’il suscite l’adhésion d’un nombre croissant de parties prenantes
– partenaires, employés, clients, etc. C’est cette dynamique sociale
qui marque la viabilité du projet. L’adhésion d’une nouvelle partie
prenante apporte de nouvelles ressources au projet, qui permettent de
définir de nouveaux objectifs, plus ambitieux que les précédents.En conclusion, un projet entrepreneurial est avant tout un processus social. Il ne s’agit pas d’avoir une grande idée pour chercher ensuite à la mettre en oeuvre, mais d’organiser un processus qui fera émerger non seulement une grande idée, mais inscrira celle-ci dans la réalité. La réflexion, l’action et la recherche de parties prenantes qui s’engagent sont donc les trois axes que les entrepreneurs développent simultanément. L’un ne peut aller sans l’autre. Analysez moins, agissez plus!
Philippes ilberzahn est professeur d’entrepreneuriat, stratégie et innovation à EMLYON Business School et chercheur associé à l’École Polytechnique (CRG), où il a reçu son doctorat. Il intervient également à HEC Paris et au CEDEP (Fontainebleau).
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