«La Banque des PME s'ouvre lundi »
Agnès Ndoumbè Epse Mandeng, directeur générale de la Banque camerounaise de Petites et moyennes entreprises (BCPME) SA.
Madame le directeur général, pourquoi ce démarrage tardif de la banque des PME, alors que vous-même avez été désignée depuis juin 2014?
Madame le directeur général, pourquoi ce démarrage tardif de la banque des PME, alors que vous-même avez été désignée depuis juin 2014?
Il est important de lever toute équivoque quant au démarrage des
activités de cette banque. Il faut noter que les banques sont des
entreprises hors du commun qui évoluent dans des domaines multi-métiers
et multi-experts. Au cours de ces dernières années,
les banques qui se
sont installées au Cameroun et en zone CEMAC ont mis entre 12 et 18 mois
à s’implanter. Or, ce sont pour la plupart des banques filialisées qui
arrivent avec leurs procédures, leurs systèmes d’information et leur
organisation ; bref un modèle de structuration rodé ailleurs. Nous
sommes partis d’une situation ex-nihilo. A cela, il convient d’ajouter
que le capital action de la BCPME est entièrement détenu par l’Etat et
de ce fait, elle est assujettie aux procédures de marchés publics.
Quelles sont les différentes étapes de mise en place de cette banque ?
Il faut savoir que c’est à partir de notre nomination le 6 juin 2014
que l’opérationnalisation de la banque a été érigée en projet. Un
projet d’une telle envergure nécessite un phasage qui a porté sur quatre
étapes : la phase d’organisation, la phase de cadrage, la phase de mise
en œuvre et la phase de commercialisation. Il convient cependant
d’indiquer que les activités ne se sont pas forcément déroulées
séquentiellement, notamment pour les trois dernières phases qui sont
fortement corrélées et interdépendantes.
En quoi a consisté la phase d’organisation ?
Cette phase s’est étalée sur les six premiers mois du projet et les
principales articulations ont été les suivantes : la validation (la
procédure d’information préalable prescrite par la COBAC) des mandats
des administrateurs nouvellement cooptés au cours de l’assemblée
générale du 6 juin 2014 ; la recherche des locaux devant abriter la
banque aussi bien à Douala qu’à Yaoundé ; la tenue du conseil
d’administration du 1er aout 2014 qui a donné le quitus pour l’exécution
des dépenses ; la sollicitation et l’obtention de dispositions
dérogatoires auprès du ministère des Marchés publics et ceci dans le
cadre de la convention d’assistance technique signée avec la SCB
Cameroun. Vous convenez avec moi que si cette souplesse institutionnelle
ne nous avait pas été accordée, l’on parlerait de l’ouverture de la
banque en 2017. Cette dérogation nous a été notifiée le 27 octobre 2014 ;
la contractualisation avec l’architecte devant configurer les locaux
en banque avec notamment la construction des réseaux électriques, de
télécommunications et d’informatique. Sans oublier bien sûr,
l’aménagement des guichets dotés d’un minimum de sécurité propre aux
exigences bancaires (sécurité anti intrusion, incendie, vidéo
surveillance etc.) Il s’en est suivi les études de faisabilité, le
planning des activités, et la recherche d’une entreprise générale apte à
mener à bien le projet dans les délais raisonnables. Les travaux ont
démarré le 20 décembre 2014 ; le choix du système d’information le 4
décembre 2014 après le lancement d’une consultation restreinte auprès
de certains éditeurs ; l’obtention du code banque auprès de la COBAC en
fin décembre 2014. La phase d’organisation a également été émaillée par
l’élaboration des manuels de procédures dans tous les métiers et
compartiments de la banque, ainsi que par la mise en conformité avec
l’administration fiscale, parafiscale, les fournisseurs institutionnels
et la profession bancaire.
Quid de la phase de cadrage ?
L’implémentation d’un logiciel intégré de gestion bancaire est une
entreprise hautement critique pour le développement de la banque. Le
choix de l’éditeur bouclé, il a fallu circonscrire notre
périmètre-métier et retenir les modules de gestion indispensables pour
l’ouverture de la banque. Les différentes négociations se sont soldées
par la signature d’un contrat le 5 janvier 2015 avec SOPRA. A ce stade,
il s’est avéré nécessaire de faire appel aux services de consultants
devant assurer les services de : Project management Office (PMO) pour le
programme de mise en œuvre de la Banque. Et l’assistance à Maîtrise
d’ouvrage (AMO) pour le volet implantation du système d’information. Le
PMO a démarré ses travaux le 1er février 2015. Sa première mission a été
de recenser l’existant et surtout de faire un descriptif détaillé des
différentes phases listées plus haut et y adjoindre un macro-planning
permettant de mieux appréhender les activités se déroulant tant au
niveau de la logistique, des procédures, de l’implémentation du système
d’information qu’au niveau administratif. Dès le 17 février 2015, un
environnement-test comprenant des postes de travail, un serveur, un
onduleur ainsi qu’un groupe électrogène entre autres ont été installés.
C’était un prérequis pour l’arrivée de l’éditeur SOPRA. Nous avons
démarré le paramétrage de notre système d’information. Mais au regard de
l’ampleur du travail, nous nous sommes résolus à faire un lotissement
du projet en termes de paramétrage. Nous avons découpé le projet en
deux. Cela a été fait pour tenir compte des attentes de la
population-cible.
Nous nous sommes concentrés sur : le Core Banking qui recouvre la
gestion de la sécurité, la tenue des référentiels, la comptabilité et
les reporting internes, légaux et règlementaires. Les métiers du front
office qui recouvrent la relation avec la clientèle, les ouvertures de
comptes, les dépôts, les virements, les prélèvements, la gestion des
chéquiers, les caisses etc. Les engagements et les divers autres modules
de gestion (gestion de la paie, des immobilisations, des stocks etc.)
font partie du second lot. Nous allons ouvrir les guichets au public et
continuer le paramétrage en arrière-plan. En d’autres termes, le cadrage
du projet a porté sur le choix des acteurs, l’organisation de la mise
en œuvre, la construction de la cartographie technique et fonctionnelle.
Nous sommes ainsi rendus à la phase de mise en œuvre…
La mise en œuvre a démarré avec la formation de l’équipe-projet
suivie du paramétrage de la solution. Après cette phase, nous avons
abordé les tests de fonctionnalités, suivi des homologations. Il fallait
ensuite recruter le personnel utilisateur pour le former au monitoring
de notre solution-métier. Ce qui a été fait dès le 1er juin 2015. Cette
étape achevée, nous avons commencé les répétitions générales en vue
d’amorcer la phase de commercialisation.
A part le progiciel de sopra banking, le système d’information
recouvre tout de même une partie infrastructure matérielle et technique ?
Oui, vous avez raison. D’abord, le choix du progiciel ensuite
viennent les préconisations matérielles et techniques. Ces
préconisations en termes de spécification peuvent être différentes d’un
éditeur à l’autre C’est pourquoi l’on ne peut acquérir l’infrastructure
technique qui va supporter le progiciel sans l’avoir choisi au
préalable. Alors à ce niveau, chaque fournisseur a dessiné et présenté
sa cartographie du système informatique en termes d’équipements
d’applications et de réseaux. Ce processus d’échanges pour le choix de
l’architecture de notre système informatique a duré environ deux mois.
Nous avons fait des arbitrages en fonction des délais de livraison, des
commandes, de la qualité technique des équipements, surtout de la
disponibilité des pièces de rechange et de la flexibilité du
fournisseur. Certains allaient jusqu’au mois de juin pour la livraison,
sans compter le délai de mise en œuvre variant de 25 jours à 50 jours.
Pourquoi des délais de livraison aussi longs ?
Parce que ce sont des matériaux fabriqués à partir du lancement de la
commande. Au lieu de fabrication, je préfère parler d’assemblage.
Parfois, il peut donc avoir des files d’attente, c’est pour cette raison
que les prestataires de ces services préfèrent être prudents. Il faut
ajouter que les prix allaient du simple au centuple. C’est le cas de la
licence ORACLE qui fait partie de notre environnement informatique. Il
était donc de bon ton de jouer de la prudence.
Succinctement, comment se présente votre système informatique ?
Nous avons une salle forte qui est le système nerveux de la banque et
pour cela, le choix a été porté sur des équipements robustes de
dernière génération, en capacité de calcul et de stockage. La banque
dispose de deux salles informatiques : un site de production et un site
de secours. En production normale, les utilisateurs sont connectés au
site de production. Le site de secours, quant à lui, a pour but de
garantir la continuité des services en cas de sinistre. Il existe trois
types d’applications dans notre environnement : les progiciels métiers,
les applications systèmes et les logiciels bureautiques (antivirus outil
de messagerie, suite bureautique etc.). Et enfin, pour les réseaux,
nous disposons d’une liaison principale inter agence ; une liaison de
secours fournie par faisceau hertzien. Une liaison Internet et enfin la
liaison APECAM vers la BEAC pour la télé-compensation.
Qu’en est-il du recrutement ?
Pour la mise en place de la banque, l’équipe-projet de départ était
constituée de douze cadres expérimentés aux compétences avérées dans les
divers métiers de la banque. A partir de février 2015, nous avons
quelque peu renforcé cette équipe, pour tenir compte des besoins dans
certains domaines notamment en comptabilité et en informatique. Au 31
mai 2015, le nombre des membres de l’équipe-projet était porté à 18. Au
cours du mois de juin, nous avons recruté environ 40 personnes dans la
perspective du démarrage de la banque lundi prochain et surtout, en vue
de la formation et l’appropriation de notre système d’information.
Cet effectif est-il suffisant ?
Dans le domaine bancaire, on commence en général avec des effectifs
très réduits tant que la banque n’est pas véritablement entrée en
production. Ceci, en raison du fait que la masse salariale est prise en
charge par le capital social au départ. C’est pour cela qu’il fallait
synchroniser le recrutement et le démarrage des activités. De ce point
de vue, l’effectif est suffisant pour le démarrage. A ce jour, le staff
de la BCPME SA est composé d’une soixantaine de cadres et agents, tous
Camerounais.
Qu’en est-il de l’assistance technique ?
La BCPME a bénéficié de l’assistance technique de la SCB Cameroun,
filiale du Groupe Attijariwafa Bank dans le processus de sa mise en
œuvre opérationnelle. Il s’agissait pour nous de capitaliser
l’expérience de ce confrère en matière de création de banques notamment
sur les volets organisationnels, logistiques, contrôles, implémentation
du système d’information. Nous tenons à saluer l’engagement de la SCB
Cameroun qui a été d’un apport précieux dans la mise en place de la
BCPME SA.
Quelle est la prochaine étape ?
A partir du lundi, 20 juillet 2015, la BCPME va entrer dans la phase
de commercialisation avec l’ouverture des guichets à sa population
cible. Cette ouverture technique qui est conforme aux usages et coutumes
en matière bancaire, nous permet de recruter nos clients et de roder
l’architecture de notre organisation tant du point de vue humain que
technique. Je tiens à préciser que l’inauguration solennelle, sous
l’égide des pouvoirs publics, viendra consacrer le lancement officiel
des activités de la BCPME SA.
Par Félicité BAHANE
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