États-Unis – Afrique : la loi Agoa prorogée jusqu’en 2025
Barack Obama a signé le renouvellement de l’African Growth and
Opportunity Act (Agoa) pour une période de dix ans. Ce système permet à
plusieurs produits en provenance d’une quarantaine de pays d’Afrique
subsaharienne de bénéficier d’un accès préférentiel au marché américain.
Le président américain
Barack Obama a signé le 29 juin le
renouvellement jusqu’en 2025 de l’African Growth and Opportunity Act
(Agoa). Cette loi américaine adoptée en 2000 exempte de droits de
douanes un ensemble de produits en provenance d’Afrique subsaharienne.
Elle arrivait à expiration en septembre 2015. Sa prorogation a été
finalement autorisée la semaine dernière à une très large majorité par
le Sénat et la Chambre des représentants américains.
Pierre angulaire
Dans un communiqué, Michael Froman, le représentant américain au
Commerce s’est déclaré satisfait : « La loi Agoa est la pierre angulaire
de notre relation commerciale avec l’Afrique depuis 15 ans ».
Rappelant que ces préférences commerciales accordées aux
pays subsahariens sont dépendantes de certains critères tels que le
respect de l’État de droit, des droits des travailleurs et des droits de
l’homme, Michael Froman a souligné que « l’amélioration et
le renouvellement de la loi Agoa pour une période de 10 ans, la plus
longue jamais atteinte dans l’histoire du programme, favorisera la bonne
gouvernance ainsi que la mise en place de politiques favorables à la
croissance et au développement, notamment dans le domaine des droits
sociaux et des droits de l’homme, tout en apportant aux producteurs
africains, aux acheteurs américains et aux investisseurs l’assurance de
stabilité dont ils ont besoin ».
Aujourd’hui, 39 pays d’Afrique subsaharienne (sur 49 États dans la
région) bénéficient des préférences commerciales accordées dans le cadre
de la loi Agoa. Plusieurs pays en ont été suspendus pour non-respect
des droits sociaux ou politiques : la République démocratique du Congo
depuis fin décembre 2010, le Swaziland depuis juin 2014, la
Gambie et le Soudan du Sud depuis décembre de la même année. Le
Zimbabwe, le Soudan, la Centrafrique, l’Érythrée, la Somalie et la
Guinée équatoriale n’y sont pas éligibles.
Efficacité
Malgré le soutien quasi-unanime que le renouvellement de la loi
Agoa a reçu du Congrès des États-Unis, ce programme fait face à de
sévères critiques. Celles-ci concernent principalement son efficacité et
la non-réciprocité des préférences commerciales.
Si les échanges commerciaux entre les États-Unis et les pays
bénéficiaires de l’Agoa ont doublé entre 2001 et 2014, ils restent assez
faibles : 50 milliards de dollars en 2014, soit bien moins que le pic
de 100 milliards de dollars atteint en 2008 et moins du tiers des 170
milliards de dollars échangés entre la Chine et les pays d’Afrique subsaharienne en 2013.
En plus, la majorité des exemptions de droits tarifaires concédés par
les États-Unis aux pays d’Afrique subsaharienne sont accordées via
des mécanismes ouverts à tous les pays en développement (via le Système
généralisé de préférences – SGP) ou à l’ensemble des pays les moins
avancés (PMA).
Dans les faits, étant donné que plusieurs produits – dans
l’agro-industrie notamment – ne bénéficient pas de ces exemptions, la
valeur-ajoutée des exemptions commerciales accordées dans le cadre de
l’Agoa est aujourd’hui faible pour les pays africains non-producteurs
d’hydrocarbures, de voitures et pièces automobiles et de produits
textiles.
Selon une étude d’avril 2015 rédigée par le service de recherche du Congrès américain [PDF],
l’immense majorité des exportations libres de droits de douanes
réalisées depuis l’Afrique subsaharienne vers les États-Unis (25,6
milliards de dollars en 2014) sont des produits pétroliers (69 % en
2014) en provenance d’une poignée de pays : l’Angola, le Nigeria, le
Tchad, le Congo-Brazzaville et le Gabon. Selon la même source, les
exportations hors hydrocarbures réalisées dans le cadre de l’Agoa et du
SGP n’atteignaient que 4,4 milliards de dollars en 2014, provenant pour
l’essentiel de cinq pays : en première place et de loin l’Afrique du Sud
(3,1 milliards de dollars), suivie par le Kenya (423 millions de
dollars), le Lesotho (289 millions de dollars), Maurice (227 millions de
dollars) et le Swaziland (77 millions de dollars). L’étude du Congrès
américain estime que la moitié des pays africains bénéficiant du cadre
Agoa ont exporté moins de 1 million de dollars via ce régime
commercial en 2014.
Préférences commerciales
Par ailleurs, des voix se sont élevées aux États-Unis critiquant le
caractère unilatéral des concessions commerciales américaines, mettant
en exergue le fait que d’autres partenaires commerciaux du continent
exigent des contreparties. « L’Union européenne, par exemple, a négocié
des Accords de partenariat économique (APE) avec plusieurs pays
africains qui fournissent certains avantages tarifaires réciproques,
pouvant présenter un désavantage concurrentiel pour les entreprises
américaines vis-à-vis de leurs concurrentes européennes », souligne la
même étude.
Signe le plus clair de cette volonté de faire davantage profiter les
entreprises américaines de la croissance des marchés africains, sous la
pression de législateurs étasuniens, l’Afrique du Sud a accepté de
réduire les barrières à l’importation du poulet américain, quelques
semaines avant le vote par le congrès américain.
La loi renouvelant l’Agoa appelle d’ailleurs les États-Unis à
négocier davantage de traités de libre-échange et d’investissements
bilatéraux avec les pays africains.
Par Clémentine P.et Joël T, jeuneafrique
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