Développement : le défi des classes moyennes

Par Alain TCHAKOUNTE, Cameroon Tribune, 26-07-2013

Cinq chefs d’Etat du continent ont participé mardi à Brazzaville, au Forum Forbes Afrique 2013.

C’est à midi pile que le président Denis Sassou N’Guesso a effectué son entrée dans la salle de conférence du ministère des Affaires étrangères, à Brazzaville. Le n°1 congolais était accompagné de ses homologues Jacob Zuma d’Afrique du Sud, Blaise Compaoré du Burkina Faso, John Dramani Mahama du Ghana et Macky Sall du Sénégal. L’ancien Sg de l’Organisation des Nations unies Koffi Annan et plusieurs autres fils prodiges du continent les y attendaient, pour une joute verbale sur le thème : « Emergence des classes moyennes africaines : financement des infrastructures, entrepreneuriat et nouveaux modes de consommation. »
C’est que, cette catégorie sociale charrie tous les enjeux du développement en Afrique. Elle produit et consomme en même temps. Elle est le cœur de cible de toutes les initiatives positives sur le continent.
Le président Sassou N’Guessso, à l’ouverture du forum, a indiqué que cette nouvelle strate de la société africaine s’élargit de jour en jour. « Il ne faudrait pas observer passivement ce phénomène. Il semble judicieux pour les dirigeants africains, de stimuler la croissance, dynamiser sur le long terme l’offre et la demande ». Pour lui, entretenir et satisfaire cette demande nécessite de garantir la stabilité politique, assurer un bon climat des affaires, et maintenir la stabilité macro-économique nationale.
Se succédant sur le pupitre, les chefs d’Etat n’ont pas lésiné sur les formules pour faire comprendre les enjeux cruciaux du développement du continent, eu égard à l’émergence des classes moyennes. Si Macky Sall estime que le spectre de l’afro-pessimisme s’éloigne, avec un taux de croissance au-dessus de la moyenne mondiale (5,9%), les Africains doivent rester mobilisés et combatifs. Encore trop de pauvreté existe sur le continent. « L’émergence ne va pas de soi. Ses piliers devraient être une éducation de qualité, une agriculture mécanisée et modernisée, la disponibilité de l’énergie. L’expérience montre que le chemin de la croissance et de la prospérité est indissociable du développement des infrastructures», a martelé le président sénégalais. Avant de reconnaître que l’accès à l’énergie est encore faible : sur 1,5 milliard de personnes vivant sans électricité dans le monde, 80% se trouvent d’Afrique.
Développement des infrastructures
L’Afrique des peuples se fera donc avec les infrastructures. On a appris au cours du forum de Brazzaville que le programme pour le développement des infrastructures en Afrique (Pida), doté de 58 milliards de dollars sur 2012-2020, a déjà été lancé et présenté récemment au sommet des Brics en Afrique du Sud. Dès lors, le plaidoyer de Macky Sall prend tout son sens : « Nous connaissons bien nos besoins en matière d’infrastructures. Il faut mobiliser les ressources pour les financer. Les instruments de l’aide ne sont plus adaptés à nos ambitions. Il faut de l’audace, car nous ne pouvons plus accepter d’être contenus par des processus qui depuis 20-30 ans n’ont pas permis à l’Afrique d’émerger. On ne peut pas développer le continent par des concepts dépassés ». Traduction : les Africains devraient se lancer dans des joint-ventures, le partenariat public-privé et stimuler le commerce intra africain. Car pour John Dramani Mahama, on note seulement 11% des échanges entre pays du continent. Ce qui est anormal. Nécessité donc d’agir et avancer à l’unisson. « Nos pays ne peuvent pas créer séparément la richesse », a ajouté Blaise Compaoré.
Si on parle aujourd’hui d’une classe moyenne africaine, dont le nombre a plus que triplé en trente ans (de 100 millions à 350 millions), comme le reconnaît Jacob Zuma, c’est la preuve que l’Afrique a fait des efforts et s’améliore. Les prédictions selon lui, sont encore plus explicites : sept des économies à croissance rapide seront issues d’Afrique subsaharienne, dans les cinq prochaines années. « La classe moyenne en est la clé, car son émergence s’accompagne du développement des marchés de biens de consommation. Et dans ce sillage, les contacts étroits avec des entreprises internationales doivent être noués, afin d’assurer le transfert de technologies », a conclu le président sud-africain.

-Les chefs d’Etat ont donné de la voix.

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