L’Afrique évalue ses performances industrielles
Par Jeanine FANKAM, Cameroon Tribune
Un demi-siècle après l’indépendance, l’Afrique demeure le continent
le moins industrialisé du monde. « Toutes les politiques industrielles
ont échoué », constate l’économiste René Kouassi, directeur des affaires
économiques de la Commission de l’Union africaine dans un livre qu’il
vient de commettre.
Et pourtant l’industrie demeure le principal levier du développement qui
apporte la valeur
ajoutée aux matières premières à travers la
transformation. L’industrialisation est un gisement d’emplois, un
vecteur de création de la richesse, la voie de la croissance. Mais la
réalité est implacable : l’Afrique reste à la traîne !
De 1960 à 2013, que de plans et stratégies économiques pour faire
décoller l’industrialisation tant au niveau national, régional et
continental ! Mais en vain.
L’Action pour le développement industriel accéléré (ADIA), l’une des
dernières trouvailles de ces politiques, a été structurée en 2012 autour
de quelques groupes de projets et n’a pas non plus comblé les attentes.
Yves Ekoué Amaizo, économiste togolais, promoteur de Afrocentricity
Think Tank est catégorique : « Les objectifs n’ont jamais été clairement
définis, les moyens pour les atteindre ne sont pas adéquats et
finalement les approches stratégiques ne sont pas pragmatiques ». Ainsi
explique t-il les différents échecs. Il ajoute : « les leaders
africains ne font pas confiance en leurs économistes. Ils préfèrent
importer des modèles qui maintiennent le continent dans la dépendance
extérieure ». En réalité, les défaillances du marché sont la cause
principale du manque de transformation en Afrique. Le continent ne
produit pas pour transformer. Du coup, il ne produit pas pour consommer.
Ces choix industriels ne laissent ni transparaître la productivité, ni
l’impact sur le développement social. Les pays, pour la plupart
demeurent tributaires de l’exportation et le secteur informel reste le
principal pourvoyeur d’emplois, d’où le développement du phénomène de
sous-emploi.
Le quatrième congrès qui s’est ouvert lundi dernier dans la capitale
ghanéenne a quelque chose de particulier. Presque pas de personnalités
politiques, en dehors du ministre ghanéen qui a présidé la cérémonie
d’ouverture, mais davantage de techniciens. Presque pas d’experts
étrangers, mais des technocrates africains, très peu de "vieux
briscards", mais une présence réelle de jeunes, à la tête bien pleine et
bien faite. Le signal est fort et Réné Kouassi l’a souligné : « Le
congrès pose un problème africain, par les Africains et la solution
viendra des fils du continent ». Il est surtout attendu un regard neuf,
des solutions novatrices et adaptées par une ressource humaine dont
l’Afrique ne doute pas de la qualité.
Il est question de partir de la thématique du congrès : « Politique
industrielle et performance économique en Afrique » pour proposer des
solutions qui permettent de rassembler le secteur public, le secteur
privé, la société civile autour d’une vision industrielle commune avec
les droits et les obligations qui y sont associés. Car, les jeunes
économistes invités, enthousiastes, laissent transparaitre dans leurs
interventions, que le développement industriel ne peut plus se concevoir
sans stratégie d’intégration et d’inclusion. Il s’agit de concevoir des
politiques industrielles qui commencent par les petites agglomérations
et qui permettent aux paysans d’entreprendre la première transformation
à leur niveau avant d’atteindre une échelle plus manufacturée.
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