Comment avancer dans votre carrière quand votre chef ne vous y aide pas

De nombreux moyens sont à votre disposition pour faire votre propre promotion.

(Kristi Hedges, HBR France) Récemment, lors d’une conférence, j’ai modéré un panel composé de dirigeants ayant réussi et leur ai demandé de décrire une personne qui avait joué un rôle décisif dans leur carrière. Deux panélistes se sont lancés avec enthousiasme, racontant des histoires de chefs qui les avaient guidés, encouragés et qui leur avaient ouvert des portes. Puis, d’un ton d’abord
hésitant, la dernière participante a fait part d’une tout autre expérience.

Elle s’est plainte de n’avoir jamais eu la chance de travailler pour des individus de cette nature, et il lui arrivait de penser que le fait de ne pas avoir de chef compétent pouvait non seulement faire dérailler une carrière, mais aussi être un échec personnel. A un moment donné, elle avait bien travaillé pour un dirigeant qui avait commencé à la coacher, mais il avait été remplacé par une personne tellement dénuée de sens politique qu’elle avait appris à faire exactement le contraire de ce qu’il préconisait. Elle avait fini par comprendre qu’au lieu d’attendre l’arrivée d’un chef qui puisse la soutenir, il lui fallait trouver une autre solution.

Tandis qu’elle parlait, j’ai remarqué qu’un peu partout dans le public, les gens hochaient la tête ;  quand elle a eu fini, elle a été bombardée de questions.

Pour nous aider à atteindre nos objectifs professionnels et à gravir les échelons dans une organisation, le soutien d’un mentor peut se révéler inestimable. La première personne à laquelle nous pensons pour remplir ce rôle est notre supérieur hiérarchique direct, le mieux placé pour évaluer notre travail. Un bon protecteur partage son opinion et prodigue des conseils tout en nous montrant de quoi nous sommes capables – révélant, ce faisant, des qualités dont nous ignorions peut-être être dotés. Nous puisons dans la confiance qu’il ou elle a en nous jusqu’à la faire entièrement nôtre. L’un des panélistes a ainsi raconté combien il avait été stupéfait que son chef le propose pour un poste avant qu’il ne soit prêt. Il l’avait néanmoins accepté et, étroitement guidé par ce chef, avait appris sur le tas.
Les mentors nous servent également de modèles, en nous donnant la possibilité de voir comment nous pouvons marcher dans leurs pas (c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles la représentativité est fondamentale : corriger les déséquilibres raciaux et de genre dans les entreprises).

Mais mon expérience m’a montré qu’il est plutôt rare que les supérieurs hiérarchiques directs soient des protecteurs qui soutiennent la carrière de leurs subordonnés. Il leur manque souvent certaines compétences en matière de développement personnel ou d’influence au sein des organisations. Ou bien ils tiennent trop à protéger leur propre statut pour prendre le risque de faire monter une autre personne en compétence.

Alors que faire si vous n’appartenez pas aux rares chanceux travaillant pour un puissant chef qui les soutient ? Premièrement, sachez que vous n’êtes pas seul : vous ne partez pas avec un handicap aussi lourd que vous le pensez. Deuxièmement, suivez les conseils ci-dessous pour trouver ce dont vous avez besoin ailleurs.

Créez-vous une équipe de parrains

Plutôt que de n’avoir qu’une seule personne sur qui compter, songez à mettre en place une équipe qui vous aidera à faire progresser votre carrière. Soyez ouvert, considérez plusieurs niveaux hiérarchiques et différentes fonctions, tant en interne qu’à l’extérieur de votre organisation. Recherchez des individus plus avancés que vous dans leur carrière et dont vous admirez les réussites et le style. Il peut être utile de lister les qualités que vous souhaitez développer et de les associer à des personnes qui en sont pourvues.

Une façon élégante d’approcher un soutien potentiel est de lui demander conseil. Plutôt que de révéler vos faiblesses, cela renforce la crédibilité de la personne à laquelle vous vous adressez, comme le montrent des études menées par la Harvard Business School et la Wharton School. En outre, quand une personne donne un conseil, elle s’implique dans ce conseil, et donc dans votre sort. Inutile que cela ait lieu dans un cadre formel ; d’ailleurs, vos soutiens ne sauront peut-être jamais que vous les considérez comme tels.

Etre obligé de se constituer un groupe de conseillers pour pallier l’absence d’un bon responsable hiérarchique peut se révéler avantageux. A trop dépendre d’une seule personne, vous courez le risque d’échouer à mettre en place un réseau résilient et de sombrer dans un abysse organisationnel si jamais votre supérieur quittait l’entreprise. Sans compter que, si être associé de très près à une étoile montante peut être bénéfique, votre réputation pourrait être entachée si le même individu tombait en disgrâce.

Priorisez la visibilité

Sans chef pour vous mettre en avant devant diverses parties prenantes, il vous appartient de trouver par vous-même le moyen d’y parvenir. Recherchez des projets transversaux ou internes qui impliqueront ou seront présentés à ces différentes parties prenantes. S’il n’y en a pas, proposez un projet en phase avec les valeurs ou la vision de l’entreprise, ou bien qui résout un besoin identifié.
Par exemple, une de mes clientes s’est portée volontaire pour mettre en place un groupe de travail sur la diversité et l’inclusion afin de comprendre pourquoi l’entreprise n’arrivait pas à attirer des talents d’origines diverses au-dessus du niveau manager malgré le fait que cela soit une priorité affichée. Elle a usé de ses compétences en leadership et en stratégie pour piloter le projet et a présenté les conclusions de l’équipe au comité de direction. Résultat : le P-DG a créé un poste de vice-président chargé de la diversité et l’y a nommée.

Identifiez les influenceurs et proposez votre aide

Chaque organisation a ses centres d’influence, mais certains se trouvent en marge des organigrammes officiels. Prenez, par exemple, l’influence que peut avoir un conseiller stratégique qui prend sa retraite et quitte l’équipe dirigeante, ou celle que peut avoir l’assistant de longue date du P-DG.

Rob Cross, enseignant au Babson College, conseille de coucher sur papier les connexions qui existent entre les salariés pour mettre en évidence les sphères d’influence au sein d’une organisation et, en particulier, les individus par lesquels transitent nombre de ces connexions. Ses recherches montrent ainsi comment de nouveaux collaborateurs peuvent réussir sans avoir de mentor officiel en développant des relations productives avec des leaders d’opinion clés.

Une fois les influenceurs identifiés dans votre entreprise, rendez-vous utiles auprès d’eux. Et plutôt que de vous concentrer uniquement sur ce qu’ils peuvent vous apporter, pensez à ce que vous pouvez leur offrir. Venez-leur en aide sans attendre quoi que soit en retour à court terme. A long terme, vous gagnerez leur confiance. Etre un « donneur », comme le formule Adam Grant, professeur à la Wharton School, est souvent bien plus bénéfique et efficace que de n’être que « preneur ».

Prenez appui sur les pressions externes positives

Bâtir son statut en dehors d’une organisation permet souvent de gagner en visibilité en interne. Les dirigeants remarquent ceux qui sont visibles auprès des clients, des différentes parties prenantes et des acteurs du secteur. A n’importe quel niveau, les professionnels peuvent se construire une solide plateforme qui aura plus de portée que leur simple position dans l’entreprise ne le laisserait prévoir.
Trouvez une façon d’y parvenir qui soit vraiment intéressante pour vous. Vous pouvez ainsi décider d’adhérer à une association professionnelle et de vous appliquer à en devenir l’un des dirigeants. Vous pouvez aussi vous constituer une liste d’abonnés sur les réseaux sociaux en tant qu’expert sur un sujet donné et en dialoguant avec des penseurs reconnus dans votre domaine. En général, les départements de relations publiques sont friands des salariés qui proposent des idées, qui se rendent disponibles pour des interviews ou qui sont prêts à rédiger des articles. Demandez aux RP comment vous pouvez les aider à atteindre leurs objectifs, et donnez suite à leurs propositions. Apporter des idées sur des sujets qui vous intéressent et qui sont en lien avec vos domaines d’expertise – et devenir pourvoyeur régulier de thématiques intéressantes auprès de l’équipe RP – peut faire de vous un expert de référence.

Imaginez qu’un client raconte à votre hiérarchie que l’une des raisons pour lesquelles il a choisi votre entreprise est un article que vous avez écrit sur les tendances du secteur. L’idée est loin d’être farfelue : il m’est déjà arrivé que des clients citent la reconnaissance par des pairs comme un critère important d’évaluation des membres d’une équipe. Difficile pour la reconnaissance en interne d’avoir autant de poids qu’une validation externe.

Si vous avez le choix, il n’y a pas de doute qu’avoir un chef influent et qui vous soutient bénéficiera directement à votre carrière. Mais même cela ne suffira peut-être pas. Les entreprises sont en mouvement constant, et avoir à sa disposition une diversité de moyens pour faire sa promotion – ou laisser les autres le faire à sa place – constitue une démarche plus durable. Vous attacher le soutien de différentes personnes qui peuvent vous aider à grandir de manières diverses est sans doute la meilleure stratégie que vous puissiez adopter.

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