Pourquoi vous ne devez pas suivre aveuglement les modes managériales
Romain Zerbib |
Même les pratiques les plus séduisantes et les plus médiatisées sont parfois juste bonnes à… éviter.
(HBR France) Adopter la dernière pratique à la mode (bonheur au travail, entreprise libérée, flex office…) constitue une tentation pour de nombreux managers.
Une telle démarche est pourtant loin d’être anodine. Il existe quatre
bonnes raisons de ne pas succomber à ces nouvelles tendances
souvent
présentées comme des recettes miracles.1- Restez concentré sur vos objectifs
Succomber aux sirènes de la mode, c’est prendre le risque de dilapider un temps précieux dans le déploiement d’une solution séduisante certes, mais qui ne répond que trop partiellement aux véritables enjeux de votre organisation.
Songez à votre « to-do list » trimestrielle. A-t-elle réellement
quelque chose à voir avec cette nouvelle pratique tant vantée sur les
réseaux sociaux ? Qu’il s’agisse de mettre en place des réunions en
marchant, des espaces cosy de méditation ou encore des salles de
luminothérapie… Si les solutions en vogue ne correspondent pas à vos
besoins, laissez-les passer. Même si elles sont promues par d’éminents
experts.
2- Etre prisé par le marché n’est pas forcément un gage de qualité
Le fait qu’une solution soit particulièrement médiatisée ne constitue
aucunement un gage de qualité. Certains théoriciens des modes
managériales, comme Christophe Midler dans « La logique de la
mode managériale » ou Eric Abrahamson dans « Management Fashion » ont
parfaitement décrit la mécanique qui conduit un ensemble de cabinets de
conseil, de médias, d’universitaires et de managers à converger, en même
temps, sur un même dispositif de gestion. Cette union éphémère
s’explique d’abord par des facteurs cosmétiques. Un professeur optera
volontiers pour une solution didactique commode à enseigner, un manager
pour une feuille de route prémâchée, un média pour une nouveauté
créatrice d’audience, etc, et tous, pour un dispositif validé par une
institution de prestige. En revanche, nulle étude scientifique ne permet
de démontrer que la pratique élue par le marché ne soit la plus
efficace. Une étude
menée par deux chercheurs de Harvard a démontré que l’open space
réduisait de 70% les échanges entre collaborateurs. Il s’agissait
pourtant d’une formule d’aménagement consensuelle massivement
recommandée pour améliorer la qualité des relations. Autre cas de
figure, les cours en ligne ouverts pour tous, les MOOCS, qui à en croire
de nombreux experts, devaient révolutionner le monde de l’éducation.
Pourtant, cinq ans après son lancement en France, le concept a encore du
mal à prendre. Nombre d’exemples prouvent que le marché n’a pas nécessairement le nez creux.
3- C’est vous qui détenez les clefs
Vous connaissez parfaitement votre organisation (ses contradictions,
son histoire…), les ressources disponibles (temps, compétences…) et la
latitude réelle dont vous disposez (culture d’entreprise, politique
interne…), alors faites-vous confiance. Intégrer de « but en
blanc » une solution externe supposément capable de produire partout les
mêmes effets est un leurre. Le succès d’une mode repose en effet sur le
principe que l’on peut réussir en imitant les meilleures entreprises.
Or il n’y a pas de problème identique car toutes les entreprises, y
compris les plus performantes (Amazon, Google, Apple,
etc.), sont uniques. Les stratégies qui fonctionnent (ou ont
fonctionné) pour les unes ne sont pas automatiquement vouées à marcher
pour les autres, qui plus est sur un autre marché, et à une autre
période. La meilleure réponse ne peut venir que d’un savant mélange
d’inspirations et d’expériences adapté à votre environnement… et à votre
caractère. Mais nullement de la copie conforme d’une recette supposée
miraculeuse qui, de toute façon, sera bientôt remise en cause.
4- Marquez votre différence
Un leader, c’est avant tout un homme ou une femme courageuse qui
possède une vision personnelle et une capacité à engager les autres
parties prenantes. Il ne se contente pas de faire du copier-coller pour
mener une stratégie indifférenciée, peu enthousiasmante et à terme moins
performante. Renforcer la performance d’une organisation exige plus que
jamais de se réinventer à chaque instant. Dès lors, quelle démarche
serait plus risquée que de céder au prêt-à-penser ? Privilégier une
approche clef-en-main à une démarche personnelle est sans doute
illusoire. Les pratiques à la mode souffrent en effet d’un formalisme et
d’une simplicité excessive. Néanmoins, garder un œil avisé sur les
nouvelles tendances, sans pour autant tomber dans un conformisme béat,
peut aider à enrichir vos processus internes. Et une évaluation
constante de vos actions – au regard de vos objectifs – est le meilleur
moyen de juger de la pertinence des solutions que vous choisirez de
mobiliser.
Commentaires
Enregistrer un commentaire