Paulin Edou Edou: « Je laisse une OAPI en excellente santé »
DG sortant de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle, fait le bilan de ses deux mandats à la tête de l’institution.
Monsieur le directeur général, vous venez de passer 10 ans à la tête de l’OAPI. Quelle institution laissez-vous ?
Mon action à la tête de l’OAPI est le fruit du plan d’action et d’orientation stratégique
que j’ai présenté en 2007 au Conseil d’administration. Le maître mot de ce plan était la modernisation de l’institution pour en faire l’une des plus fiables mais aussi les plus respectées en matière de gestion de la propriété intellectuelle dans le monde.
Pour revenir à votre question, comme résultats probants de mon engagement au service de l’OAPI et de la propriété intellectuelle en général, je laisse une institution totalement transformée. Je voudrais, pour illustrer mon propos, citer trois domaines majeurs qui ont connu cette transformation au cours de mes mandatures. D’abord sur le plan infrastructurel, on peut citer la construction de ce nouveau siège qui orne désormais le paysage urbain de la capitale du Cameroun et la rénovation de l’ancien bâtiment. Au niveau de l’infrastructure virtuelle, le chantier de la numérisation de toutes nos archives, notamment les archives techniques est en cours. La numérisation va, à terme, induire une véritable révolution dans notre capacité à rendre l’information disponible pour nos usagers. Elle permettra aussi de mettre hors de danger la mémoire de notre organisation. L’autre transformation, et non des moindres, s’est faite au niveau des ressources humaines. J’ai sans cesse œuvré à placer la formation au centre de mon action, d’abord pour le personnel de l’organisation, mais également pour de nombreux cadres de nos Etats-membres, voire au-delà. Pour ce faire, il a été mis en place un programme de Master II en propriété intellectuelle, en collaboration avec l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et l’Université de Yaoundé II. Je voudrais enfin souligner que je pars en laissant une OAPI en excellente santé financière.
Ces dernières années, on a beaucoup communiqué autour de la propriété intellectuelle. Avez-vous le sentiment que les Africains protègent davantage leurs trouvailles?
Les actions de communication menées dans le cadre du projet que nous avons baptisé OAPI-Média visaient la démythification de la propriété intellectuelle, en informant tous azimuts, en expliquant et même en démontrant l’intérêt et le rôle que la propriété intellectuelle joue tant pour l’individu que pour la société toute entière. Cela a-t-il suffi à inciter les uns et les autres à protéger leurs créations ? Je ne peux être affirmatif dans l’absolu. Toutefois, l’on peut observer que d’années en années, le nombre de demandes de marques va croissant, pour ne parler que de cet objet.
Les Camerounais vous doivent la reconnaissance internationale pour le poivre de Penja et le miel d’Oku. Quelles perspectives pour les autres produits du terroir ?
C’est justement avec beaucoup d’engagement que nous avons conduit ces deux produits à leur labélisation en indications géographiques protégées (IGP) et je ne peux dissimuler ma fierté. Le succès que rencontrent ces deux produits camerounais sur le marché international me conforte dans l’idée que la valorisation des produits locaux, des produits du terroir est incontestablement un des piliers du développement économique de nos pays. C’est pour cette raison que nous avons négocié une nouvelle phase du projet de promotion des indications géographiques dans les Etats-membres de l’OAPI, connu sous l’acronyme de PAMPIG. Le Cameroun, au même titre que d’autres Etats-membres, bénéficiera de cette phase, avec de nouvelles labélisations de produits.
Comment entrevoyez-vous l’OAPI dans les dix prochaines années ?
L’avenir de l’OAPI peu ou prou est lié à la situation économique dans le monde. C’est dire que les facteurs exogènes doivent être pris en compte pour faire une sorte de projection de ce que sera l’OAPI. Pour ce qui est des facteurs endogènes, par nature plus maîtrisables, je garde espoir que l’OAPI est promise à un bel avenir. Ma conviction se fonde sur l’ensemble des chantiers entrepris et qui, je ne peux en douter, vont continuer avec mon successeur. Il s’agit par exemple de la ratification du nouvel accord révisé, de l’achèvement du chantier de numérisation de nos archives techniques, de l’interconnexion entre le siège et les centres de documentation en propriété intellectuelle dans les Etats membres, sans oublier le dépôt électronique des demandes de titres – brevets, marques - qui sera bientôt une réalité à l’OAPI.
Plus que par le passé, l’OAPI est mieux regardée par le public camerounais. Je puis vous dire que c’est le même regard au niveau international. Notre organisation a résolument pris le cap de la modernisation pour devenir l’un des offices les plus fiables et les plus respectés au monde. Nous en avons posé les bases. Je reste optimiste pour l’avenir de l’OAPI et souhaite vivement qu’elle continue de relever les défis du monde moderne. Qu’elle reste comme je le dis souvent, ce véritable laboratoire d’analyses capable d’aborder, sans complaisance, ni complexe, les questions de développement en rapport avec la propriété intellectuelle.
Jocelyne NDOUYOU-MOULIOM
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