Une concertation pour valoriser le potentiel énergétique de l'Afrique

La concertation de Yaoundé entre producteurs, transporteurs et distributeurs africains d’énergie électrique s’articule autour d’une problématique cruciale : comment fournir l’électricité, en quantité et au moindre coût, pour répondre aux besoins croissants d’un continent qui aspire à l’émergence ? Les experts sont formels : aucun développement durable n’est envisageable sans ressources énergétiques suffisantes et appropriées. Le défi énergétique n’est pas le moindre des paradoxes pour l’Afrique. Malgré un potentiel énorme en énergies fossiles et renouvelables (charbon, pétrole, gaz, soleil, cours d’eau…) le continent présente pourtant d’importants déficits énergétiques. Les ressources disponibles étant largement sous-exploitées, la consommation énergétique par habitant reste très faible, en l’absence d’une offre satisfaisante.
C’est particulièrement vrai pour l’électricité dont l’impact direct sur la vie des populations en fait une préoccupation centrale dans la problématique du développement économique et du progrès social, en ville comme en campagne. Le constat global est sans équivoque : l’Afrique est le continent le moins électrifié. Une vue du ciel est encore plus parlante. Selon les astronautes, la planète terre, vue d’en haut, présente d’énormes disparités entre les continents sur le plan de l’électrification. Les grands bouquets lumineux qui correspondent aux pays industrialisés d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Asie, côtoient de gros trous noirs qui représentent presque toujours les régions sous-développées d’Afrique ou d’Asie du Sud.
Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), seul un quart d’Africains a accès au réseau électrique. En clair, des centaines de millions de personnes sont dépourvues d'électricité, ou obligés d’en produire localement au prix fort, grâce à des groupes électrogènes gourmands en carburant et autres moyens de bord. D’où les coûts de production et de vente particulièrement élevés. Sur le continent même, les disparités sont nombreuses. Hormis l’Afrique du Sud (65 % de la production totale) et le Maghreb, les pays de l’Afrique subsaharienne accusent un énorme retard qu’il semble urgent de rattraper. La consommation d’électricité par habitant y représente à peine 1 % de celle d’un pays à revenu élevé. Or, partout dans le monde, le taux d’accès à l’énergie électrique est intimement lié au niveau du développement économique et social. Les coûts économiques des délestages étant prohibitifs, il est évident que les pénuries d’électricité ont une incidence sur la productivité et la compétitivité dans une économie de plus en plus mondialisée où l’énergie, sous toutes ses formes, est devenue un facteur déterminant de croissance. N’oublions pas que l’électricité est, par ailleurs, un indicateur du confort individuel et de la performance économique.
Avec une forte croissance démographique et des perspectives économiques prometteuses, la demande d’électricité au sud du Sahara va croître de 8 % en moyenne par an. Parce qu’ils sont tous concernés par cet enjeu capital, nos pays ont l’impérieux devoir de mobiliser leurs énergies pour changer la donne. Le développement des infrastructures électriques participe de la lutte contre la pauvreté en même temps qu’il répond aux Objectifs du Millénaire. Toujours est-il que l’accroissement de l’offre exige d’importantes ressources financières. Selon les experts, il faudrait investir plus de 200 milliards de dollars (100.000 milliards de francs Cfa) d'ici à 2030 pour atteindre un taux global d'électrification de 56%. Cet argent, il faudra le trouver quelque part. C’est ici que le financement d’un Fonds de développement de l’énergie prend tout son sens. En attendant de traduire ce vœu pieux en acte concret, le moment semble indiqué pour réactiver les fameux pools énergétiques régionaux qui devraient servir de plates-formes pour l’interconnexion des différents réseaux. A ce sujet, on peut se réjouir du fait que le Cameroun ait déjà engagé des pourparlers avec certains pays voisins.

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